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    L'appel résonne dans la nuit.

    Un appel clair, un son métallique sorti du bol qui chante, une vibration magique.

    Elle a tracé un chemin de lumières dans l'herbe humide, un chemin de bougies enveloppées de papier pour le mener jusqu'à elle. 

    Là-haut, au bout du jardin laissé sauvage, elle attend son amant sous le Chêne.

    Elle attend sans se lasser de faire vibrer le bol chantant pendant que l'encens balinais étire ses volutes sorties d'une souche. 

    Tout autour d'elle, un grand Cercle de lumières rouges, blanches. Lueurs douces et vacillantes dans la pénombre. Elle se tient au centre, vêtue d'une robe longue de lin rouge écarlate, lacée sur sa poitrine, les cheveux lâchés en boucles libres sur les épaules, le regard noir comme la nuit à peine éclairée d'un croissant de lune fine.

    Au-dessus, dans les branches du Chêne protecteur et bienveillant, trois boules de papier suspendues laissent échapper une lumière douce, tamisée sur un lit de fortune pourtant très accueillant.

    Une pierre d'améthyste est posée sur la souche près de l'encens et d'un calice de bois sculpté rempli d'eau. Une grande bougie blanche à la flamme imperturbable attend aussi son heure de magie.

    L'amant a suivi les lumières jusqu'à Elle, il s'est présenté à elle alors que la vibration du bol s'évanouissait dans l'air frais du soir. Elle a suspendu son geste à son arrivée.

    Pour entrer dans le Cercle magique il doit se déchausser. Les pieds seront nus pour sentir l'herbe et les forces telluriques, laisser son corps s'ancrer à la Terre.

    Il entre dans le Cercle de Lumière, le rituel peut commencer.

    La Sorcière accueille les éléments dans le Cercle.

    La Terre sous leurs pieds et par cette pierre d'Améthyste emplie de rêves.

    Elle accueille le Feu porteur de loyauté et de la passion qui les anime avec la grande bougie.

    Elle accueille l'Air, le vent, le souffle du temps et des souvenirs.

    Puis l'Eau dans le calice, porteuse d'amour qui apprend la patience.

    Et enfin les Esprits qui leur apportent la sagesse.

     

    A présent elle plonge son regard dans celui de son amant et lui demande s'il veut bien lier sa main à la sienne.

    Il accepte du bout des lèvres sans la quitter des yeux. 

    Leurs mains se prennent, paume contre paume, les doigts enlacés au poignet de l'autre et Elle enroule autour d'elles un simple cordon de coton, le laissant retomber de part et d'autre de leurs bras.

    La voix de la Sorcière poursuit doucement son incantation d'amour.

     

    "Nous lions nos mains ce soir l’une à l’autre sous le Chêne, témoin silencieux, de ce qui nous uni.

    Ce lien nous enlace mais il n’est pas noué, il n’est pas fermé.

    Tu n’es pas à moi, je ne t’emprisonne pas.

    Je ne suis pas à toi, tu ne m’emprisonne pas.

    Aucune porte n’est close.

    Ce soir nous consacrons seulement notre amour face aux

    esprits de la Nature.

    Par ce lien ouvert je te fais don de mon cœur, de mon corps, de mon âme.

    Même si j’en demeure la gardienne tu as le droit d’y entrer.

    Je promets tout autant de laisser danser les vents entre nous, de ne jamais m’enchaîner à

    toi, de respecter ta solitude, d’être aussi discrète qu’à l’écoute, de marcher près de toi 

    mais sur mon propre chemin.

    Tu ne seras pas mon ombre, je ne serai pas la tienne.

    Je serai honnête et vraie, sensible et forte, douce et libre.

    Unie à toi par ce simple souhait, sans contrainte, sans sacrifice, sans mensonge, sans 

    promesse, si ce n’est celle de ne jamais te faire de mal.

    Acceptes-tu d’en faire autant ?"

     

    Dès lors son amant accepte et scelle leur souhait commun par un baiser.

    Elle l'entraîne alors hors du Cercle de lumière pour aller entourer le tronc du grand

    Chêne avec le lien qui entoura leurs mains lors du rituel amoureux. Elle le noue avec

    l'aide de son amant, le confiant aux bon vouloir de la Nature.

     

    "Je confie ce lien à l’écorce du Chêne.

     Je confie notre amour à la Douce Mère. Qu’elle veille sur nous, qu’elle nous épargne les 

    blessures, qu’elle nous préserve de la douleur.

    Je lui laisse le soin de veiller sur toi, sur moi, sur notre amour.

    Je lui confie nos sentiments. Elle seule aura le choix d’y mettre fin ou de les perdurer,

    temps que nous y croirons."

     

    Alors la Sorcière éteint quelques bougies autour du Cercle et reviens vers son amant près du lit sous l'ombrage. Les faucons qui ont fais leur nid plus haut ne sont pas loin. 

    Alors l'amant regarde autour de lui, écoutant les bruissements qui viennent de toutes parts dans cette nuit étoilée.

    Debout près du lit de fortune, il se retourne vers la Sorcière qui, s'approchant de lui,

    a délassé sa robe sur sa poitrine jusqu'à la laisser tomber à ses pieds nus, dans l'herbe. Sans plus d'artifice que le voile frais de la nuit sur sa peau blanche, elle s'offre à son amant qui la prend dans ses bras.

    Il est temps de consacrer leur amour et ce rituel.

    Le tendre amant a murmuré à sa Sorcière combien il la trouvait belle, avant de la coucher sous les étoiles et les branches du Chêne.

     


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